top of page

Le Contexte…!

Ciel d'Apocalypse.

3 Avril 2020


Neige, pluie, grêle, bourrasque, humidité, grésil, vent, chaleur extrême, brume, verglas, froid, givre, rafale de vent, éclair, boue, tonnerre, sont tous des éléments en mesure de décourager un humain d'aller courir. Je me plais à dire qu'il n'y a pas de mauvaise météo, mais qu’il n'y a que des gens trop mal habillés... Ou mal préparés... Ou mal entrainés. Depuis plusieurs années, je m'incite à aller courir dans toutes les conditions météorologiques possibles. Aucune chance que quelque chose d'aussi incontrôlable que la température puisse m'empêcher d'enfiler les kilomètres. Contrairement aux "Moldu" (Humain qui ne court pas, ou non-magicien pour d'autres), le coureur que je suis finit par apprécier encore plus que tout, les pires conditions. La température est alors le contexte, le cadre, la couche de finition à une sortie de course. C'est à ces moments là, ou tout se produit. C'est à ce moment précis que les choses deviennent hors normes. C'est dans ces moments là que la nature révèle ses plus majestueux tableaux et extirpe le meilleur des ressources de l'homme. C'est dans ces conditions ou les photos deviennent les plus magiques, les plus grandioses. Ce sont ces jours là ou la lumière humble et naturelle devient simplement divine. C’est là ou tu as définitivement l'impression d'avoir toi-même créé un tableau de Delacroix, dans toute sa furie et son élégance. Encore mieux, d’en faire partie. Là ou les plus beaux clairs obscurs des plus grands musées du monde apparaissent, là, devant toi, sur un lac, une forêt, une falaise. Il suffit d'être là, d'être présent, d'être en action, pour être partie prenante de ce tableau vivant et magnifique.


Il y a quelque chose de si naturel et de tellement héroique dans l'affrontement d'une tempête ou de n'importe quel condition extrême. Alors que ces jours là, le commun des mortels se refuse à sortir de chez lui pour faire des choses importantes de la vie quotidienne. Le coureur acharné regarde le tout d'un oeil narquois et moqueur, avant de sortir de chez lui et de s'élancer directement dans les éléments. Comme on aurait tendance à sauter dans une ouverture temporelle digne des grands films de science-fiction. L'hiver, quand les météorologues annoncent une tempête de neige, je suis déjà à prévoir mon parcours avec une excitation palpable pour le lendemain matin. Quoi de plus satisfaisant que de revenir d'une longue course ou tu viens de livrer un combat épique et mémorable. Vivre des conditions titanesques, te rends obligatoirement titan toi- même.


Il faut peut-être un peu d’imagination, un peu de folie, ou peut-être un peu de créativité. Mais il semble que mon cerveau à une tendance à modifier la réalité. À modifier ce contexte dur et inconfortable, que peut la météo, en un épisode fantastique d’un livre dont vous êtes le héros. Quoi de plus fabuleux que de te croire au beau milieu d'un col méconnu des Alpes Italiennes ou quelque part sur l'Everest dans des conditions apocalyptiques. Quand la neige te fouette le visage. Devoir garder les yeux à demi-fermé parce que le grésil cingle tes pupilles. Quand en fait, au moment de relever la tête, tu réalises que tu cours simplement sur la rue principale de ton village. Ou tout roule au ralenti autour de toi, à cause des quantités monstrueuses de neige tombées, que même les écoles sont fermées. Que même les gens prennent congé pour éviter les déplacements en voiture. Et toi tu cours.


Je viens d’une enfance ou mon père nous faisait glisser mon frère et moi, la grande côte de 100’ à Val-D’Or, dans le froid abitibien, en pleine tombée de neige. En prétendant que la première traine-sauvage était un navire de la marine marchande Britannique, et que la deuxième, cachée un peu plus bas en contre-bas, dans le sous-bois était un côtre à hunier avec en tête de mât le pavillon noir. Et que tout au long de la descente les pirates devaient prendre possession du navire marchand. Dans un combat au corp au corp, ou tout les coups étaient permis. Presque à tout coup, tout le monde finissait dans le décor, dans des éclats de rires monumentales. Alors déjà à cette époque, une simple glissade d’enfant dans la neige prenait des proportions dignes des grands romans maritimes de Pat O’Brian et des grandes mers du sud. Et pas une seule fois la discussion ne tournait autour de cette météo Sibérienne.


Et puis, croire que tu es le seul survivant d'une incroyable expédition dans le grand nord, avec des réserves d'eau qui diminue, seulement quelques barres énergétiques, les pieds et les mains qui commencent à geler. Et tu cours et tu cours longtemps, très longtemps, pour finalement revenir à la surface et terminer ta longue course du Samedi dans les sentiers, juste à côté du chalet, ou la cheminée fume déjà depuis un bon moment. C'est te sentir plus que vivant que de partir, un matin à -37 degrés Celcius à la frontale, avec tes raquettes de course dans le sac à dos, au cas ou les choses se compliqueraient. Et mettre un pied devant l'autre dans la nuit froide, la nuit solitaire, avec ta respiration qui gèle automatiquement dans ta barbe d'une semaine, tes narines qui semblent vouloir se figer sur place et avoir la nette conviction que tu pars à la recherche de nouveaux territoires lointains et sauvages. Faire passer le faisceau de ta lampe frontale dans tous les coins sombres de la forêt, te demandant à quand la rencontre avec le grand Yéti du nord. Jusqu'au moment ou, plusieurs heures plus tard, quand le soleil commence à chauffer l'air, croiser un couple de retraités qui te disent bonjour tout bonnement, t'envoie la main et te souhaite une bonne course matinale.


Toute personne ayant besoin de se sentir vivre, devrait un jour ou l'autre courir un Ultra. Juste pour ne plus douter et se sentir vivre officiellement... Complètement.

Être ton propre super-héros, débute par sortir dehors, se tenir droit devant le froid, le vent et la pluie. Puis simplement mettre un pied devant l’autre pour avancer. C’est un geste simple, mais tellement révélateur de la personne que tu es ou que tu pourrais devenir. La température pour un coureur de sentier est définitivement le rôle de soutien que tout rôle principal a besoin pour briller. C’est le contexte qui transforme une sortie banale d’un dimanche matin banal, en aventure incroyablement plus grande que grande. Les choses changent le jour ou au lieu de combattre le temps, tu l’apprivoises et que tu apprends à vivre avec les éléments. À être simplement un des atomes mobiles qui gravite dans un monde déjà en mouvement et beaucoup plus puissant que ta petite et humble personne.

250 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page